ce soin brutal


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on dit ça comment, dans quelle langue. ce soin brutal. on ne veut pas que la musique cesse, que ça ferme. je préfère renverser les tables. si tu préfères te réfugier dans les bras de l’inconnu. quelqu’un s’est barricadé aux toilettes. qui reste immobile, de profil, hors des questions du miroir. des gens parlent à travers la cloison, en battements sonores. amours de carrelages. et moi là seul sous les facettes. je n’avais plus, depuis de longues années, je n’avais plus pensé à cette personne. qui vient d’entrer, de passer la porte à l’heure pourtant de la fermeture. et me dévisage fièrement, me disant, « te voilà enfin ». je sais qu’on a envie de parler, de pleurer, sous les barricades. aucun repentir. pas de prétexte. même nu. on avance l’un vers l’autre et déjà nos ombres se touchent. je m’étais évanoui la première fois, chez toi, souviens-toi. — je sais, je sais tout, puisque je me souviens. tu es saoul. viens.


comme les bras peuvent vous manquer parfois. ainsi que marcher longtemps le long d’un quai, la nuit, en parlant. tous ces pas grand chose. qu’on peut regretter. une vie entière. je n’avais même pas une photo de toi. je n’avais plus que le souvenir de cette chanson russe. et de nuits non couchées. viens mon hiver, je t’accompagne. allons fumer ensemble en regardant la braise, sous la pudeur des arches. et ces mille vernis sur nos visages-soupçons. on appelait ça les ambres. prête-moi tes yeux fermés, la douceur des regrets. que toute cette attention est violente. je suis d’accord pour changer de tout, d’emballage. j’aime toujours l’indélicatesse de tes regards. que je retrouve les lendemains, intacts. balais qui me ramassent in extremis.

poème sans soirée de nouvel an


entortillant le fil des pensées ou du téléphone
s’ennuyant aux onze coups de onze heures
des soirées à détester d’avance
à rêver de taxis disponibles
pendant ce temps, une jeune femme va bientôt descendre du Paris-Nice
et embrasser des inconnus dans la rue
c’est un autoportrait qu’elle m’a fait dans un message
je me demande si ce n’est pas un rendez-vous masqué
il faut tout laisser jouer
de deux choses l’une, la troisième
embrassez qui vous trouverez
retrouver dans la rue le rougeoiement d’une joue
sur la voie de disparition perpétuelle
lutte croisée de deux jambes en cônes
et bas sans visage
agenouillé devant des pierres angulaires
pourquoi toujours imaginer des trucs sans fin
en longues et interminables détresses
triangle noir
geste d’invite à écarter les réticences

cloisons


téléphones casques portes etc.
exploitation, fabrique, études
je vous vois dans un trust en face
étrange beauté
des expériences
plusieurs étages de trouble
nous séparent
allons voir si la
chaîne des caractères
ou l’encore-regard
de la photocopieuse
exécute en désordres
son enchaînement précis et en cascade
de gestes voués à l’échec.
confidentielles impressions
des contrats à la pelle
mais rêves de vous en fresque
reposer le combiné
répondre à l’appel
faites semblant de ne pas entendre
je vous ai surpris
derrière la porte
tout à fait entre nous
figure renversée
ce n’est pas de votre classe
le badge à votre poitrine
je veux vous retrouver
à cinq heures à l’oral loin d’une
machine qui ne tourne plus
pourra-t-on revenir au début
je suis repassé par le même chemin
je ne vous ai pas vue
vous deviez être ailleurs
entre deux pages
dans quelque autre fièvre

poème superréaliste


des longues phrases
des cous de téléphones

on passe la journée à grumeler ensemble, entre les grilles de la clim
à l’hôtel des araignées comme d’âpres majestés

« oh passe moi le ciel de novembre que je t’en fasse un puits à champagne »

elle me met la main sur le ventre à la videodrome et
j’éclate de rire
car « mais il n’y a aucune épaisseur! »!

plus tard on descend à la pharmacie centrale, pour voler des cure-dents,
qu’on va fissa au musée
planter dans des picasso
pour qu’ils aient l’air plus vrais.

en rentrant, j’achète des groseilles en promo
dans sa bouche, qu’on écrase, pour faire un sang joyeux liquide acide et sucré
et on se laisse tomber lourdement sur le lit, comme ces objets dont on ne veut plus