Il y a probablement deux ou trois trucs que je peux libérer chaque jour. Sans même regarder ni devant ni derrière, sans forme de regret ou de souffrance. Il y a probablement deux ou trois choses intéressantes, je cherche le mot, pas choses, mais, enfin deux trois données plus ou moins brutes. Une petite structure simple, précise, quadrille, sans fonction que d’être. Sans fonction que d’être (je me répète ça).
Je pense soudain : « un siècle que je n’ai pas fait de lacets » (voilà par exemple une des faces du carré d’infini).
L’avantage d’être aussi peu lu, écouté, de glisser sur les indifférences : la possibilité sans fond de pouvoir tout dire et n’emporte quoi (surtout mais du bon).
Il m’importe de formuler les différents régimes que je porte en moi. Des apparences se saisissent et se dessaisissent.
J’entends, toutes les nuits, la petite fenêtre carrée dans la cage d’escalier, se claquer sur elle-même. Cela a son importance, son poids, dans la désertion programmée, dans ce couloir désert.
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octobre – persévère
octobre, tu penses à quoi ? à une image sur un calendrier modern-style, accroché au fond d’un couloir, et dont on ne tourne plus les pages (je le fixe). c’était bien comme ça, octobre, un repère, un couloir. peut-être un piano qui joue pour personne, des persiennes un peu sales qui se blessent sur le ciment. je me persuade que tout est encore là, dans ce rectangle qui persévère, et le sol luit sous un soleil qui est vip. pourtant, il manque un truc, un truc qui serait « familier ». je sais pas quoi, comme une signature au tableau. il y a un plexiglas élémentaire qui recouvre mes pensées, qui les préserve du froid. mais j’ai les mains dans les poches, au fond desquelles il y a souvent un peu de givre. j’attends qu’on me prenne en photo (je me fige), mais ce n’est que la porte d’entrée du voisin qui claque. il rentre ou il sort, c’est pas plus compliqué que ça. sa « femme est partie ». il est sûrement « en dépression ». il est victime de locutions. il a aussi « un problème avec l’alcool ». ces expressions, aussi crues que celles que je lis sur les dépliants publicitaires. on s’en sert, on les plaque. mais je tiens pas en place et j’ai besoin toujours de voir si tout est encore debout. par exemple cet échafaudage en face (je vais à la fenêtre), qui vient d’être installé. je trouvais qu’il partait mal, au début. il avait l’air planté un peu de travers, je regardais perversement s’il n’allait pas tomber, sous mes yeux, en emportant ceux qui le construisaient, j’attendais, j’attendais. mais il ne tombait pas, il s’élevait au contraire. les flèches du temps vont dans tous les sens et vous percent de toute part. il y a une série de vignettes en désaccord, et qui font la rue, et qui font la vie. j’ouvre la fenêtre, et le vent fait bouger la page du calendrier au fond du couloir. ce qui est bizarre, c’est l’image ; quand elle vous tourmente l’œil, à distance.