2021-0122

J’ai décidé de ne plus postuler aux appels à textes. Inutile d’ajouter des refus, des micro-humiliations sans intérêts à toutes celles que nous inflige déjà le quotidien. Les mails contrits et tout à la fois hypocrites (“malgré toutes ses qualités”), qui se permettent même d’y ajouter des conseils (“nous vous encourageons à poursuivre votre travail”, comme si le refus de leur revue qui en est au numéro 01 allait m’apprendre à travailler) ne sont pas essentiels à la vie sur terre, ils sont même tout à fait nocifs. Contrairement à une idée que j’avais un jour rencontrée via internet (rechercher “un maximum de refus”). On m’encourage cependant à acheter la revue en question, et à “partager” son existence, bien évidemment. J’aurais encore été aigri il y a quelques mois par de tels refus, alors qu’aujourd’hui je n’en ressens rien qu’une légère lassitude qui est plutôt d’ailleurs une forme d’indifférence (peu m’importe de quoi elle ait l’air). Je m’inscris dans le creux, dans la faille. Je n’ai aucun besoin d’exister à leurs yeux voilés. Pas besoin de “partager mon existence”. Ma chaise a plus d’importance. De quoi ai-je besoin. Une question qui est intéressante. Si j’exclus la possibilité de gagner de l’argent avec des phrases, de rien, au fond. Je n’écris pas pour la lecture mais pour l’écriture, pour tracer la forme, même infime, de ma vie, aussi rudimentaire soit-elle, aussi rudimentaire et essentiel réflexe que la respiration. Chaque petite grappe de phrases que je parviens, non sans mal, à extirper de ce lieu bizarre où ça naît, est une manifestation qui vaut pour elle-même.