la vaniteuse


Dès que j’ouvre les yeux elle est près de moi. À se chauffer les fesses aux soleils d’hiver. Elle parvient encore à fumer dans les cafés, au gré de je ne sais quels arrangements. Elle sait se rendre invisible au centre des meutes, des bien-pensants. C’est aujourd’hui la plus grande qualité. Je fais pareil qu’elle. J’essaie, je la copie. Je pense, à travers elle. J’entends, quand elle chantonne, dans ma tête. Ces vieilles chansons dont personne ne veut. Notre vie invisible pendant qu’ils cherchent tous l’exposition maximale. Ils se crament la peau de cerveau qui leur reste. Vil troupeau qui va répétant. Nous sommes parmi les trop parlants dont les voix se cassent contre la vaisselle maltraitée des comptoirs. Même pas besoin de regards entendus. Je décèle, aux bottines, escarpins qu’elle a choisis, aux vêtements qu’elle a revêtus, ce qu’elle ressent ou ce qu’elle a souhaité exprimer. Chaque jour son changement de cape.
Nous sommes aux bords des découragements, c’est là qu’on aperçoit le mieux c’est-à-dire avec les vertiges, laissés seuls. La grande horloge au fronton de la gare, celle qui ne marche plus, sauf comme nous peut-être une seconde par jour. Il suffit de savoir un peu regarder. Quand regarder est comme marcher, avec le seul bruit sur le carrelage éternel du café.